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La Delirante
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On connaît surtout l'opéra qu'a fait de cette mythique pantalonnade de la commedia dell'arte, qui mêle au loufoque le merveilleux, Serge Prokofiev. Mais c'est à partir d'un conte théâtral de Carlo Gozzi, contemporain et rival de Goldoni dans la Venise du XVIII° siècle, que Meyerhold, par l'intermédiaire de Guillaume Apollinaire, qui la lui avait fait connaître, a suggéré son opéra à Prokofiev.
L'Amour des trois Oranges est inspiré, ainsi que son auteur se plaît à le souligner, d'un conte pour enfants très populaire en Italie. Le texte traduit par Eurydice El-Etr n'est pas une pièce à proprement parler - le scénario original de Gozzi, simple canevas pour les improvisations de la commedia dell'arte, étant sans doute à jamais perdu. C'est un récit insolite, la description de ce qu'était la pièce lors de ses premières représentations, et que Gozzi, avec minutie et humour, rédige une dizaine d'années plus tard, lorsque paraissent ses oeuvres complètes. Rares exceptions, ces quelques passages où Gozzi fait venir soudain ses personnages sur la page et leur donne la parole en ces vers matelliens, inventés par Jacopo Martello au début du siècle à l'imitation de l'alexandrin français, et dont il brocarde la monotonie et la platitude.
Modèle de création pour les Romantiques allemands, comme le rappelle Eurydice El-Etr dans sa préface, « L'Amour des trois Oranges », tout comme ses autres contes théâtraux, ont également exercé sur les compositeurs d'opéra une force d'attraction toujours renouvelée qui, de Wagner à Henze, en passant par Puccini, Busoni, Casella ou Prokofiev, ne s'est pas encore démentie. Et, après une longue hibernation, les pièces féeriques de Gozzi ont été remises à l'honneur sur les scènes de théâtre tout au long du XX° siècle (Meyerhold, Vakhtangov, Reinhardt, Copeau, Strehler, et, plus près de nous, Egisto Marcucci, Andrei Serban, Ellen Stewart, Benno Besson, etc.), confirmant ainsi leur vocation théâtrale.
Dans la pièce, c'est bien la bouffonnerie qui prime, mais le merveilleux aussi souvent affleure - malgré les efforts de Gozzi pour en démystifier les ficelles - ramenant le lecteur, comme jadis le spectateur, à un état d'enfance, d'innocence et de disponibilité absolues, jeu auquel Gozzi lui-même avoue, à l'Acte Deuxième, s'être laissé prendre. C'est ce double fil chez lui qui a inspiré écrivains, hommes de théâtre, musiciens : ainsi Meyerhold qui, au début du siècle dernier, donne pour nom « L'Amour des trois Oranges » à sa revue d'avant-garde, et fait travailler ses élèves du Studio sur un divertissement tiré de cette pièce, qui inspirera l'opéra homonyme de Prokofiev.
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Douze ans après un bref séjour en Chine, dont il avait rapporté des centaines de haïkaï, l'auteur nous invite à un voyage, jour après jour, dans son voyage, tirant de sa mémoire les essaims, comme d'une ruche, et de son imagination, des mots-abeilles qui bourdonnent avec une vigueur nouvelle dans ces pages, nourries des thés nombreux qui l'empêchent de dormir.
C'est un enchantement de voyager avec lui en prose et en poésie, de passer de l'une à l'autre si naturellement, sur les plus hauts sommets ou sous la neige, parmi les calligraphies et le parfum des temples, dans la discrète compagnie de Li Bai, Du Fu et Wang Wei, ses amis, qui lui répondent « par ellipses, pénombre et vers interrompus ».
Comment ne pas le suivre dans l'avion qui remonte, comme des échelles à saumons, les fuseaux horaires, jusqu'aux poissons rouges, bleus ou transparents, qu'il retrouve chaque soir devant l'aquarium de l'hôtel ; sur les toits volants, ou en pagode, surmontés de da'wen, qu'il rapproche des caractères, tout aussi incurvés, et habités, de l'écriture chinoise ; ou dans ses joutes poétiques avec des poétesses de Shanghai ou ses rencontres, également inopinées, de danseuses du Bolchoï gazouillant Pouchkine dans un bimoteur en détresse, et quelques jours plus tard flânant comme des flamants roses sur la Grande Muraille ?
C'est une visite in fineà une Chine absente, derrière la recherche forcenée de la modernité et du progrès, qui lui indique le chemin du retour, et qu'il nous fait découvrir comme les cigales quand elles font silence ou dans leur lumière intermittente les lucioles.
Poisson de roche.
Se faufile l'avion.
Et ressort des nuages.
Ébouriffé.
Sur la plus haute branche.
Après la tempête.
Dans le torrent.
Des neiges tressées.
Comme du coton.
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BRILLANTE ETOILE!
Brillante étoile! que ne suis-je comme toi immuable - / Non seul dans la splendeur tout en haut de la nuit,/ Observant, paupières éternelles ouvertes,/ Comme de Nature le patient Ermite sans sommeil,/ Les eaux mouvantes dans leur tâche rituelle/ Purifier les rivages de l'homme sur la terre,/ Ou fixant le nouveau léger masque jeté/ De la neige sur les montagnes et les landes - / Non - mais toujours immuable, toujours inchangé,/ Reposant sur le beau sein mûri de mon amour,/ Sentir toujours son lent soulèvement,/ Toujours en éveil dans un trouble doux,/ Encore son souffle entendre, tendrement repris,/ Et vivre ainsi toujours, - ou défaillir dans la mort.
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Le baladin du monde occidental (2e édition)
John millington Synge
- La Delirante
- 15 Juin 1982
- 9782857450245
C'est le texte remanié de la traduction, parue en 1974, de ce chef d'oeuvre de poésie et d'humour noir du théâtre irlandais, qui fit scandale en 1907 à Dublin et que saluèrent très tôt Yeats, Apollinaire et Breton. Tout le monde connaît l'histoire du Baladin qui se vante d'avoir tué son père, puis manque de le faire pour de bon après le retour inopiné de celui-ci au deuxième acte ; autant le récit du parricide éblouit les femmes, autant sa possibilité réelle leur répugne. Cette pièce d'un humour dévastateur et d'un lyrisme sauvage, dans laquelle chaque réplique est « aussi savoureuse qu'une noix ou qu'une pomme », est d'une vitalité proprement irrésistible.
« Il faut lire la préface de Synge, écrit Martine de Rougemont, pour apprécier la justesse et la nécessité de la version qui paraît aujourd'hui. Le texte de Fouad El-Etr est évidemment passé par le « gueuloir » : il se dit, il se chante, il respire. Fidèle à l'esprit, à la lettre, à la cocasserie de Synge, il réussit le tour de force d'être aussi théâtral que lui. »
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Koumiko Muraoka est l'héroïne d'un film, Le Mystère Koumiko, tourné en 1964 par Chris Marker à Tokyo, qui avait initialement le projet de filmer les Jeux Olympiques dans cette ville. Son mystère est celui du temps, le temps dans lequel se débattent, comme elle, ces personnages - qu'il s'agisse d'une vieille actrice qui joue son propre rôle et traverse son âge comme dans un miroir, dans Arithmétique horaire, qui donne son titre au livre ; ou de la vision au vitriol, comme une gravure de Hogarth, dans Séquences de Berlin, les arrêts sur image d'une jeune mariée sur sa vie de fossile dans cette ville séparée; ou encore du portrait, digne de La Bruyère, dans Hyppolite, une espèce d'Oblomov qui flotte sans ressort, dans une telle évanescence, ni même vélléité, qu'il en devient littéralement attachant.
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Les quatre chansons réunies sous ce titre constituent un ensemble unique dans l'oeuvre de Dante. Empruntant leur forme aux constructions complexes des troubadours qui pratiquaient la poésie hermétique du trobar clus, notamment Arnaut Daniel, inventeur présumé de la sextine, qu'il admirait, le poète exprime ici une passion sensuelle d'une violence inhabituelle chez lui, qu'on a pu comparer aux vers brûlants d'Archiloque à Néobulé. Le ton et l'intensité de ces rimes laissent penser que Donna Pietra, qu'il s'agisse de son prénom ou d'un surnom né de sa dureté, a bien été une créature de chair, qu'on a parfois identifiée avec Pietra Scrovegni de Padoue et à laquelle l'éditeur s'est résigné à prêter le profil impassible d'une jeune fille de Raphaël.
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Lisant et traduisant ensemble, depuis plus de trente ans, des auteurs de haïkaï, Muroaka et El-Etr présentent, dans une mise en page dynamique, cent-soixante-huit poèmes de printemps. Le lavis reproduit en frontispice est un autoportrait de ce poète et peintre, disciple de Bashô, né en 1716 et mort en 1783, qui voyait l'invisible et montrait seulement l'essentiel.
Penchant la tête.
Les glycines répandent.
Le printemps.
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Au puits de l'épervier ; le songe des squelettes
William Butler Yeats
- La Delirante
- 1 Décembre 2004
- 9782857450771
Au Puits de l'épervier et Le Songe des squelettes sont deux pièces en un acte inspirées à Yeats par le nô japonais que lui fit découvrir son ami et secrétaire Ezra Pound, à l'époque où celui-ci s'occupait de publier l'oeuvre que l'orientaliste américain Ernest Fenollosa avait consacrée à ce théâtre. « J'ai trouvé mon modèle dans le théâtre Nô du Japon aristocratique », écrit-il dans une préface publiée en préambule à cette pièce, qui fut sa première tentative de transposition du Nô et dans laquelle Ito, un danseur, jouait le rôle surnaturel du faucon. Dans Le songe des squelettes, Yeats intègre les éléments essentiels du Nô à une des légendes héroïques irlandaises, dans laquelle les fantômes des amants maudits, Dermot et Dervogilla, « dont les yeux peuvent se rencontrer mais les lèvres jamais », apparaissent sous la forme de deux jeunes gens au Voyageur qui tient le rôle du waki, le récitant de ces drames lyriques. À ses vers stylisés à l'extrême sa poésie insufflait, comme toujours dans le grand théâtre, sa propre tension dramatique.
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Irascible silence, illustré d'une eau-forte, placée au frontispice de l'ouvrage, de Paolo Vallorz, comprend une quarantaine de poèmes ; c'est le septième recueil de Fouad El-Etr, dont on rappelle Comme une pieuvre que son encre efface, entre autres titres, et Là où finit ton corps, vendus à près de cinq mille exemplaires, et les traductions de Synge, Yeats et Shelley, et, plus récemment, des poèmes de Keats, qui ont servi aux versions sous-titrée et française de Bright Star !, le film consacré par Jane Campioin à ce poète.
Qu'il évoque un paysage familier de Toscane ou la femme aimée, l'apparition de sa mère le jour de son anniversaire, ou la visite que lui fait son ami disparu, le peintre Gérard Barthélémy, et le portrait inachevé qu'il lui laisse de lui en partant, Chef-d'oeuvre inoubliable.
Du peintre qui peignait les regards.
De mon visage l'invisible.
On sent toujours chez Fouad El-Etr la présence palpable, physique presque, de l'invisible autant que du visible, dans la même unique hypostase, des morts que des amants Montant et remontant.
Les échelles du temps.
Ma mère dans mon sommeil.
Comme la bruine avec la brise.
Reprit la route plus légère.
Une même musique sans musique passe dans ces poèmes retenus, quels que soient leurs mètres ou leurs thèmes, la même recherche d'une commune transparence des sens et de la langue. « Il y a chez lui », a pu écrire Angelo Rinaldi, « dans un lyrisme altier et sobre à la fois, quelque chose de Constantin Cavafys », comme lui natif d'Alexandrie.
Quelques poèmes, grands ouverts, accueillants, l'essentiel, presque rien, l'infini d'un corps, la mort effleurée, la vérité des rêves, la couleur du vent Le vent s'effeuille dans les feuilles.
Comme un qui se réveille.
Le vent a perdu son chapeau.
D'étoiles et ses feuilles mortes.
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Profondement intéressé par le sens de la culture espagnole, José Bergamín étudie et analyse dans la plus grande partie de son oeuvre, essentiellement poétique d'essayiste et de critique, différents aspects de cette tradition avec la justesse de trait qui caractèrise son style.
Beauténébreux (Beltenebros) est une suite de cinq essais autour du phénomène poétique, dans lesquels il explore le large spectre de la poésie lyrique à partir de sa plus pure essence, la magie, ou enchantement poétique. De manière précise et clairvoyante, il nous parle de la constante possibilité de l'impossible en poésie, et attire notre attention sur cette tierce oreille que Nietzsche évoque dans Zarathoustra, ouverte sur l'abîme insondable, obscur ou lumineux, du merveilleux silence.
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Né en 1867 au Nicaragua il fut, dès quatorze ans, fêté comme le « poète-enfant » incomparable. Il devient, dans le sillage de Bolivar et de Marti, le symbole d'unité spirituelle de l'Amérique latine, mais c'est à Paris que son oeuvre va se construire dans la tension d'une « admiration immense et profonde pour la langue française ». Il y rencontre surtout Verlaine, « Socrate lyrique » d'une époque impossible, dont l'influence contribuera à ce que Darío soit reconnu comme le rénovateur de l'ensemble de la poésie espagnole, salué très tôt par Antonio Machado, Jorge Luis Borges et Octavio Paz. Son portrait est l'oeuvre de Joaquín Vaquero Turcios, peintre espagnol, son petit-neveu.
« Quand un poète comme Darío passe par une littérature, tout en celle-ci change. Peu importe notre jugement personnel, peu importent aversions et préférences, peu importe presque que nous l'ayons lu. Une transformation mystérieuse, insaisissable et subtile a eu lieu sans que nous le sachions. Le langage est autre. » (Jorge Luis Borges)
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William Blake et ses illustrations pour la divine comédie
W.B. Yeats
- La Delirante
- 15 Mai 2009
- 9782857450931
Ce livre est paru l'année dernière à l'occasion de la projection, lors du Festival de Cannes, au printemps 2009, de Bright Star !, le dernier film de Jane Campion, la célèbre réalisatrice de La leçon de piano. Bright Star !, qui faisait partie de la Sélection Officielle, est consacré au poète romantique anglais John Keats, atteint de tuberculose, et à sa poésie, et à sa tragique passion pour Fanny Brawne.
Fouad El-Etr, à qui Pierre Rissient, homme de cinéma et de grande culture, découvreur et représentant de Jane Campion en France, avait demandé de traduire les poèmes de John Keats pour les versions doublée et sous-titrée du film, les a réunis avec quelques autres pour en faire, dans la collection qu'il dirige aux éditions La Délirante, un livre en édition bilingue.
Ce recueil comprend, outre quelques splendides sonnets, et notamment Bright Star ! (Brillante étoile !), qui donne son titre au film de Jane Campion, quelques-unes des odes les plus connues et abouties du poète, l' Ode à un rossignol, l'Ode sur une urne Grecque, l'Ode sur la mélancolie, l'Ode à l'automne, qui comptent parmi les plus beaux poèmes de la langue anglaise, ainsi que La Belle Dame sans Merci, une ballade récitée à deux voix dans le film par John Keats et Fanny Brawne.
L'éditeur a fait reproduire en frontispice une très belle aquarelle de Gérard Barthélémy, Paysage de Dordogne, qui rappelle singulièrement la campagne anglaise.
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Ces poèmes, parus dans des revues d'avant-garde en Espagne, entre 1919 et 1922, ont été retrouvés et traduits pour La Délirante par Jean-Pierre Bernés. Qualifiés par Borges lui-même de « cubistes », ils sont tout à la fois imprégnés de futurisme, d'Apollinaire, de la Révolution d'Octobre et de la découverte de l'amour. On est ému de tant de générosité, d'enthousiasme, de candeur et déjà de maîtrise formelle.
Dans le matin léger.
S'étirent des milliers de drapeaux.
La lumière.
Comme un lierre.
Pend aux murs.
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À l'ensemble incomplet paru sous ce titre le 15 juillet 1848 dans la Revue des Deux Mondes, nous avons joint la traduction de deux autres poèmes de Heine, Déclaration et La Tempête, qui lui appartiennent et furent proposés à tort, après la mort de Nerval, comme les deux parties d'un poème isolé, La Mer, dans le volume consacré à ses traductions de l'allemand par l'éditeur Calmann-Lévy.
« Dans la Nord-Sée (Mer du Nord), écrit Gérard de Nerval en préambule à ses traductions, le poète a peint des marines bien supérieures à celles de Backhuysem, de Van de Velde et de Joseph Vernet ; ses strophes ont la grandeur de l'Océan, et son rythme se balance comme les vagues [...] Shelley et Byron seuls ont possédé à ce degré l'amour et le sentiment de la mer... »
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Pour ce poète hongrois né en 1877, mort en 1919, l'excès fut la seule mesure. Sa rencontre avec Léda, femme de sa vie et de ses plus beaux poèmes, scelle son destin. C'est une juive hongroise mariée à un homme d'affaires installé à Paris, une belle, forte femme qui révèle le poète à lui-même, et l'emmène d'autorité vivre avec elle à Paris une passion syncopée, faite d'adoration et de haine, d'imprécations et de prières, de retrouvailles et de ruptures.
De son exil qui le libère et le rapproche, comme souvent, de son pays, où boisson, drogue et débauche, exaltation et dépression règlent ses jours et ses nuits, il compose avec rage la majeure partie de son oeuvre, faisant subir à sa langue natale les soubresauts et les déchirures de sa vie. Edith Bargès et Fouad El-Etr proposent ici trente-trois de ces poèmes en français.
Edith Bargès et Fouad El-Etr proposent dans ce recueil trente-trois poèmes d'André Ady, qui fut le porte-drapeau, au début du XX° siècle, du renouveau de la poésie et de la pensée sociale en Hongrie. Avec Attila Joseph, c'est le poète le plus important, et le plus connu de ce pays.
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Qui ouvrira ce livre s'étonnera peut-être, en ces temps d'incertitude, de lire des poèmes dont la poésie ne soit pas problématique, nous voilà d'emblée en présence d'un poète qui, s'il ne « craint pas le bonheur », ne craint pas de même la poésie. Et ces poèmes sont autant d'ouvertures immédiates à cette essence de la poésie que tant de « modernes » tentent de cerner si discursivement qu'ils finissent par nous en éloigner.
Les signes de cette présence tiennent autant à la maîtrise d'un rythme qu'à la place dominante de l'amour ; car si le rythme donne son unité formelle au poème, c'est peut-être parce qu'il est le calque du temps de la vie et de l'amour dont ces vers sont à la fois la cristallisation et la célébration.
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Sous l'apparente fluidité de leur cours, l'écho que laissent en nous ces poèmes n'en est pas moins hermétique, non que nous ne comprenions pas, mais comme si nous faisions à la fin partie d'un secret, le secret du poète : « Seul est visible l'invisible / La transparence est mon secret. » Partant de l'amour du monde, cette poésie est invinciblement aimantée vers le coeur mental qui en assure l'unité et la possibilité même d'y vivre. Et c'est le langage lui-même qui est saisi au plus près du corps, dans sa gangue primitive, « les mots que sont tes lèvres quand tu parles » ou « les mots qui viennent comme l'eau », et nous nous émouvons aussi de ces daurades dont on ne sait si c'est leur sonorité ou leur forme ou quelque souvenir encore qui vient les faire bondir sur la page.
En hésitant désir comme un essaim d'abeilles.
J'éveille la beauté la beauté me réveille.
Je défroisse des sens la translucide élytre.
Rêve au-delà du rêve dans la chaire entr'ouvert..
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Voici un nouveau choix de poèmes de W. B. Yeats dont certains étaient encore inédits en français : des poèmes romantiques de ses débuts aux poèmes ésotériques et visionnaires du grand âge, cette anthologie condense en fait tout ce qui est essentiel dans la poésie de Yeats, ce qui en fait le ton unique et irremplaçable, du sentiment dépouillé de la nature occidentale d'Irlande aux complexes constructions mentales d'une culture de retour à ses sources orientales, sans oublier les poèmes d'amour tour à tour triomphants ou désespérés de celui qui y consacra sa vie. Vingt-trois poèmes qui trouvent une autre unité en français cette fois-ci, celle que leur donne Fouad El-Etr, leur traducteur.
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Cet ouvrage rassemble quatre essais inédits sur la poésie, auquel le premier, La jouissance littéraire, donne son titre ; les autres s'intitulent Grandeur et limites de Quevedo, Le gongorisme et L'écriture du bonheur. Trois portraits de Borges, Quevedo et Góngora, spécialement réalisés par Botero, illustrent ces essais.
« Il y a aussi de l'immortalité dans les choses éternelles. La lune, les rossignols, le printemps, disent la gloire de Henri Heine, la mer sous le ciel gris, celle de Swinburne, les quais et les embarcadères, celle de Walt Whitman. Mais les immortalités majeures - celles du domaine de la passion - demeurent vacantes. Il n'existe pas de poète qui soit l'expression totale de l'amour, de la haine, de la mort ou du désespoir. »
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C'est la première édition en France d'un recueil complet de sonnets amoureux de ce contemporain de Góngora, le plus acharné de ses ennemis littéraires, et de Lope de Vega, dont ne sont connus ici que les Songes, tableaux satiriques de la société et de la politique de son temps, et son roman picaresque, El Buscón, fleuron baroque du genre, très vite traduit dans toutes les langues de l'Europe.
Les titres de ses poèmes le sont déjà : Aux cendres d'un amant recueillies dans un sablier ; Communication d'amour invisible par les yeux ; Pour Aminta qui avait un oeillet à la bouche et qui, voulant le mordre, mordit ses lèvres et fit jaillir son sang ; Amour d'un seul regard s'allume et alimente sa flamme ; Amour constant au-delà de la mort ; A Lisi coupant des fleurs et entourée d'abeilles. Même son nom est passé dans la langue pour désigner ses inséparables lunettes : les « quevedos ».
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Il s'agit exclusivement d'un choix de sonnets lyriques de celui qu'on a surnommé tour à tour le Pindare ou l'Homère de l'Age d'or de la poésie espagnole. Ce sont ces fameux poèmes qui ont concouru à la réputation hermétique de leur auteur, à ce « gongorisme » tant décrié par le bon goût classique français. N'est-il pas remarquable - est-ce le recul du temps ou la traduction qui en est ici proposée ? - de noter combien ce qui a pu apparaitre d'un formalisme exacerbé, sinon obscur, est au contraire d'une limpidité lyrique exemplaire ? Et que ce qui a pu sembler une distorsion de la syntaxe était une tentative de chanter au plus près de sa « fine voix d'or », comme dit de manière gongorine Ruben Darío, cette dame qu'il a connu enfant, par exemple :
Je dirai comme de rayons j'ai vu ton front.
Couronné, et que fait ta beauté.
Chanter les oiseaux, et pleurer les gens.
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Ces anonymes latins du Moyen-Âge sont d'origines et de dates diverses. L'inventeur des textes, qui en est aussi le traducteur, est parti de la découverte d'un long poème, d'une beauté rauque et brutale, intitulé Sémiramis, tout entier traversé par l'ombre de cette reine amante d'un taureau (« Le nom d'une femme a été saccagé par le ventre d'un taureau », ainsi commence le poème). À ce poème se sont ajoutées d'autres pièces variées, incantatoires ou lyriques, précieuses, dans tous les sens du terme, par la hardiesse de leurs images et les surprises qu'elles ménagent. Contrairement à la poésie du Moyen-Âge que l'on connaît, la rhétorique est ici bousculée et les ruptures d'une étonnante modernité.
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Qu'il suffise, pour présenter Intermezzo et sa traduction, de rappeler que ce poème était pour Nerval l'oeuvre la plus originale de Heine et qu'il ne lui trouvait de comparable que le Cantique des Cantiques. « Son origine hébraïque, écrit-il, lui fait retrouver des accents et des touches dignes de Salomon, le premier écrivain qui ait confondu dans le même lyrisme le sentiment de l'amour et le sentiment de Dieu. C'est la souffrance de l'âme aimant le corps d'un esprit lié à un charmant cadavre ; c'est Cupidon ayant pour Psyché une bourgeoise de Paris ou de Cologne. » Heine, émerveillé, reconnaissait que « sans comprendre beaucoup la langue allemande, Gérard de Nerval devinait mieux le sens d'une poésie écrite en allemand que ceux qui avaient fait de cet idiome l'étude de toute leur vie. »